Il n'y avait qu'une petite fenêtre de tir : après des jours de pluie et des rivières en crue, toute la semaine avait été correcte, sans pluie, quoique assez froide. Samedi était annoncé comme ensoleillé et couvert en soirée, avant la reprise de la pluie dimanche. J'imaginais partir à Vienne, afin de limiter les effets du froid sur l'activité des poissons, mais Fabienne m'a rappelé qu'un jour de départ en vacances, ce n'était peut-être pas une idée formidable.
Débit de la BRA autour du jour de cette sortie, le 30/06 Restait à me libérer. J'avais bien travaillé à la maison les semaines et jours précédents (mine de rien, trois semaines sans pêche !) et après une matinée à la bibliothèque en famille et un vrai repas, je partais tranquillement pour arriver au bord de la PRA à 16h. Sur le chemin, j'avais hésité avec la BRA, mais vendredi les niveaux étaient bien trop importants et je cédai donc à la raison.
Cette fois je suis monté seul : la sortie était trop imprévue pour prévenir Jean-Marc. Et j'avais envie d'un peu de solitude, pour être entièrement à ma pêche, sans autre relation. N'empêche, je m'en voulais un peu de bruler tant d'essence pour moi tout seul - sans compter le péage.
Je m'arrête au village du camping, histoire de regarder l'eau et l'activité. L'eau est claire, magnifique. Le temps est parfait : ciel assez clair mais pas complètement dégagé, pas trop chaud, presque un peu lourd. Je vois un poisson immobile dans le calme avant la chute. Truite plutôt que chevesne, malgré ce poste surprenant. Je repars à la voiture monter ma canne, sans passer les wads. Bien sûr, lorsque je reviens le poisson est parti - mais je m'y attendais un peu :-) Je passe sur l'autre rive pour pêcher un peu les courants, d'abord avec une araignée écureuil puis, comme j'ai du mal à la voir, avec un palmer tricolore clair. Je redécouvre les problèmes de vrillage du fil, sans faire monter un seul poisson !
Photo prise lors de la sortie précédente, lorsque l'eau était un peu haute. Le X signale une retourne (pas vraiment visible ici en raison du niveau) dont il sera question plus loin.
Au bout d'une heure, je remonte au village au-dessus. Je vais voir la rivière en sortant de voiture. Cette fois c'est un coin que je connais et je constate que le niveau est parfait, plus bas que lors de notre dernière sortie. Pas d'activité, pas d'insectes dans l'air... Tout de même, au bout de cinq minutes, un gobage, puis un autre. Donc je pars mettre mes wads si lourds et si chauds, que je roule à la taille pour qu'il ne reste que les pantalons. C'est moins chaud, mais je suis toujours très engoncé : ils sont vraiment trop épais. C'est pénible, même si on s'y fait en action de pêche. Je crois vraiment que l'achat de respirants n'est pas loin. Peut-être si je décroche ce nouveau boulot à la mairie : les prix sont intéressants chez Taimen. En même temps, la saison chaude ne durera pas longtemps et je peux attendre la reprise de la fabrication chez Décath. Et il y a l'option Patagonia garantie à vie, ceux qu'utilise Jean-Marc, très chère. En fait je devrais peut-être commencer par m'acheter des néoprènes plus légers. On verra au retour de vacances...
Je démarre avec une mouche je ne ne vois pas bien - je ne sais plus quoi exactement, mais je la remplace par une peute, dont la plume est dans les tons clairs. Peut-être un peu trop grosse pour les rares insectes dans l'eau: h14 je crois, ou 16 - mais pour le coup bien visible même si elle flotte bas. Assez rapidement, je prends un poisson, une arc je crois, puis un autre malgré un ferrage très appuyé. A vue de nez 20+ et 15-20 cm. Ici, la taille importe peu. Immédiatement, la confiance entamée par les deux dernières sorties revient.
Sur une inspiration, je repêche tout de suite la petite retourne à la sortie du pont où je viens de prendre ce deuxième poisson, me disant qu'il n'était peut-être pas seul (alors que rien ne le laisse supposer). Dès le premier passage, je fais attention à bien ramener ma soie. Le poisson gobe ! Mais de nouveau je ferre fort et cette fois je casse, au niveau du noeud entre 10 et 12 centièmes. J'y laisse cette belle peute à corps en dubbing olive assez claisemé, qui laisse voir le fil de montage rouge sur l'hameçon. Une belle tête rouge bien vernie - et je n'en ai pas d'autres de ce modèle. Il faudrait que je monte enfin des séries car mes boites ont beau être pleines, je me sens pauvre.
Depuis le début de cette sortie, j'ai retrouvé le plaisir de ma Sage. J'ai pourtant hésité au moment de la monter : j'avais pris aussi la 8'6, ce qui se justifiait ici toutes choses égales par ailleurs. Je ne le regrette pas : je fouette bien, je ne la trouve pas lourde comme la fois précédente.
Je monte sur le pont pour observer. Je vois deux truites, que j'essaye en nymphe. D'abord avec une PT non lestée, sans succès. Je suis en train de changer de mouche lorsque j'entends des voix derrière moi. Je me retourne: deux toqueurs, qui pêchent le courant du pont, où je viens de passer. Ils montent sur le pont, me demandent si ça donne - je leur dis que j'ai fait deux petites. Eux viennent d'arriver. Ils voient une truite sous le pont, je leur dit de la tenter car je ne peux le faire d'où je suis.
J'ai vu un beau gobage au-dessus d'une grosse pierre de bordure, et un autre encore au-dessus dans le virage. Les oiseaux qui volent au-dessus de la rivière confirment qu'une éclosion est en cours. Chouette, les conditions s'améliorent :-) Je quitte le pont et me positionne sur la berge pour marquer mon territoire. Je remets une sèche - encore une peute, cette fois-ci plus petite, corps en fil jaune clair. Il doit être 18h environ. Lorsque je le dépasse, l'un des toqueurs me dit qu'il s'est mis à la mouche mais que ce n'est pas facile. Je l'enjoins à persévérer, que passé le premier obstacle technique on commence à s'amuser.
Je n'ai qu'une angoisse : que les toqueurs me passent devant pour pêcher le profond du virage. Je sais que quoi que je dise s'ils sont décidés rien n'y fera. Mais ce sont des gars corrects, ils partent en silence. Moi en revanche, je pousse un
put**n aigu et sonore en croyant avoir cassé au ferrage sur le beau poisson qui gobait devant la pierre. En fait le poisson n'a pas gobé (ou a refusé) et en en ferrant je me suis accroché à une mousse. Je passe à une peute tête noire et corps en faisan, plutôt sombre, en h 16. Un poisson gobe non loin, je le prends assez rapidement. J'étais toujours sur la berge, cette fois je descends dans l'eau pour le décrocher.
Je passe en revers et à trois reprises en quelques minutes je dois aller décrocher ma mouche dans un buis derrière moi : je fouette trop en arrière. Finalement, je réussis à me corriger et progresse doucement en fouettant. Je passerai ensuite en revers roulés pour remonter les lecteurs les plus encombrés.
Le "festival" a commencé ! Je terminerai ce secteur en totalisant 9 truites (dont 1 arc supplémentaire + 3 dépiquées), la plus belle atteignant presque 35 cm. Une belle robe avec des bandes bien marquées. C'est celle qui a gobé le plus en douceur, contrairement à ses congénères. Je l'ai bien vue monter : un beau rayon de soleil éclairait la rivière à ce moment-la. Sans cela, je n'aurais pas vu ma mouche : en roulés, pas de faux lancers pour sécher la mouche et pas question de graisser cette peute qui fonctionne si bien dans la pellicule. A un moment, j'en prends trois coup sur coup sans changer de place : je passe plus de temps à nettoyer et sécher ma mouche avant de relancer qu'à pêcher ! Je ne suis pas trop précis avec ma longue pointe (environ 150 cm à vue de nez), pourtant : il y a du poisson, je suis au bon endroit au bon moment et j'ai une bonne mouche. Dans ces conditions, la pêche est facile ! Mais c'est la première fois de ma courte vie de moucheur que je suis dans cette euphorie et cette simplicité... Ah non, la deuxième : il y a eu aussi ce formidable coup du matin sur le Guiers l'année de mes débuts. Sacré souvenir, j'en souris encore de bonheur quand j'y repense :-)
Ma peute ne se porte pas bien : usée par trop de dents peut-être, la tête commence à se dénouer. Je coupe ce fil qui pendouille et elle prend encore un poisson avant de rendre l'âme : la plume se détache. Brave soldat :-) Je la remplace par un sedge cervidé de JM alors que j'arrive dans la partie encombrée, que j'avais l'intention d'explorer à l'origine. Je remonte sur quelques mètres encore en roulés - un petit courant de bordure semble propice, mais pas de trace de poissons. Je n'insiste pas : je veux descendre un peu plus bas pour le coup du soir et il doit être déjà 19h30.
Au cds, vraiment pas grand-chose, un seul petit gobage - un poisson que je ferai monter sans le prendre. Et un kamikaze qui se jette sur mon sedge alors que je le ramène, et se dépiquera tout de suite. Le temps est peut-être trop frais, ou l'éclosion a été trop tardive et les mouches ne sont pas encore retombées. Je n'insiste pas : la journée a été belle, je suis heureux et serein.